Détention de Cécile Kohler et Jacques Paris en Iran : « L’exécutif français n’est pas totalement au rendez-vous », regrette l’ex-détenu Louis Arnaud. France-Info.

« L’exécutif français, aujourd’hui, n’est pas totalement au rendez-vous », regrette mercredi 7 mai sur franceinfo Louis Arnaud, arrêté en septembre 2022 en Iran, alors qu’il voyageait comme touriste. Il a été libéré le 13 juin 2024. Mercredi marque les trois ans de détention arbitraire de Cécile Kohler et Jacques Paris, un couple d’enseignants détenus dans la prison d’Evin, à Téhéran, accusés d’espionnage, mais toujours pas jugés.

« Il y a un soutien aux familles, bien évidemment, et j’ai également une confiance absolue en l’ambassade et en tous ceux qui œuvrent sur le terrain », nuance Louis Arnaud, lui-même ancien otage de l’Iran. « C’est une question de ligne politique. Il y a quelques semaines, l’État français et l’Union européenne ont émis un certain nombre de sanctions contre des membres du régime [iranien] qui sont extrêmement symboliques et qui évitent soigneusement les vrais responsables. En plus de ça, il y a eu une plainte qui a été déposée devant la Cour internationale de justice, mais qui porte sur une ‘technicalité’ administrative ». Début avril, la France a annoncé qu’elle allait déposer plainte devant la CIJ, car les deux enseignants emprisonnés n’ont toujours pas reçu de visite de la part de diplomates français, comme c’est pourtant leur droit.

Il y a deux ans, « Jacques était déjà dans un état extrêmement préoccupant »

Louis Arnaud a été détenu dans le même bâtiment que Cécile Kohler et Jacques Paris, la section 209. « J’y ai passé six mois, eux y sont depuis presque trois ans. Une cellule de huit mètres carrés sans fenêtre, avec des lumières éblouissantes allumées 24 heures sur 24. On vit sous l’œil des caméras. Il n’y a rien dans cette cellule, pas de lit, pas de livres, pas de télévision et on est traité comme un animal, décrit le trentenaire.

« On vit, on dort, on mange à même le sol et on vous sort deux à trois fois par semaine 30 minutes et c’est tout. Le reste du temps, vous êtes enfermés dans votre cellule.« 

Louis Arnaud, ex-détenu en Iran à franceinfo

Il n’a eu que très peu de nouvelles des deux otages lors de son séjour dans la section 209. « Tout est fait pour que vous ne croisiez absolument personne, relate l’ex-otage. Les seuls moments où vous sortez, c’est pour aller en interrogatoire, ou pour aller faire votre sortie deux à trois fois par semaine, et vous avez les yeux bandés. Les seuls témoignages que j’ai eus, c’étaient des gens qui avaient été dans la même cellule que Jacques, et qui pouvaient me témoigner de son état, qui était déjà extrêmement préoccupant il y a deux ans de ça », s’alarme-t-il.

« Si l’esprit lâche, le corps cède »

« C’est un endroit où il n’y a pas un jour qui est facile, où la survie est un combat de chaque jour, de chaque heure, de chaque instant, et qu’à un moment, si l’esprit lâche, le corps cède, se souvient Louis Arnaud. Il y a quelques mois, il y a un touriste suisse qui est mort dans de telles conditions. C’est un endroit où on peut mourir et après trois ans, ce qui est un acharnement comme je n’en ai absolument jamais vu sur aucun autre otage que j’ai pu côtoyer, il y a vraiment une urgence à les sortir de là. Sinon il n’y aura plus rien à sauver », avertit-il.

Il met en garde ceux qui souhaiteraient se rendre en Iran. « Un Iran qui est aux abois, ‘cornérisé’ par le reste de l’Occident, a besoin d’otages. Ce qui m’est arrivé, ce qui est arrivé à Jacques, ce qui arrivera à d’autres, c’est que d’aller en Iran aujourd’hui, c’est jouer à la roulette russe, c’est prendre un risque énorme d’arrestation arbitraire ».

Article de France Info: https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-grand-temoin/detention-de-cecile-kohler-et-jacques-paris-en-iran-l-executif-francais-n-est-pas-totalement-au-rendez-vous-regrette-l-ex-detenu-louis-arnaud_7219338.html

L’ancien otage Louis Arnaud, aux côtés des parents d’Olivier Grondeau, lui aussi ancien otage en Iran, le 1er février 2025, à Paris. (SEBASTIEN DUPUY / AFP)